Comment réagirait la fachosphère si les sanctions économiques contre la Russie commençaient à porter leurs fruits ? C’est toute la question.
Si vous pensez que le cortège des trolls pro poutine ou bien ses soutiens affichés de la fachosphère ont renoncé à soutenir leur employeur/idole, vous vous plantez lourdement. Ils continuent lourdement, article, après article, sujet après sujet, désinfo après info à travailler leur oeuvre de sape de la vérité. Et un des sujets qui les travaillent lourdement, ce sont les sanctions économiques occidentales contre la Russie: aucune désinformation n’est trop bonne.
Et pour commencer à marteler une petite musique: ces sanctions ne fonctionnent pas, par contre elles affectent l’occident.
Les petites comptes le martèlent:
Certains sont un peu plus élaborés et donnent des éléments assénés comme des preuves irréfutables:
Bien entendu, on ne détaille pas les milliers de messages sur les réseaux sociaux qui reprennent ce narratif.
Et les « gros » sites de la fachosphère ne sont pas en reste, bien au contraire. Que ce soit les sites alliés des alliés de Poutine, ici le site de T. Meyssan: « réseau international » (site pro Assad)
Ou bien les classiques relais des partis d’extrême droite français, que ce soit les identitaires, Zemmour ou le Rassemblement National:
Et ce ne sont que des exemples, chaque jour, des centaines de comptes ou de sites sortent la même grosse artillerie.
1) L’économie russe
L’argument des trolls pro poutine est simple:
« les sanctions sont inefficaces, par contre NOUS en sommes lourdement affectés. ».
Le narratif derrière cette batterie d’argument est simple: l’UE est un nain économique, Poutine est le « maître du jeu », nos sanctions n’atteignent pas son pays de par notre faiblesse et sa force…
Or il faudrait rappeler qu’aujourd’hui, la seule force de Poutine, c’est le nucléaire. Ce n’est même plus son armée classique dont on sait désormais (au vu des échecs successifs militaires effarants qu’elle a subi en Ukraine) qu’elle serait battue aisément en combat « classique ». Et son point fort n’est certainement pas son économie dont le PIB atteint péniblement celui de l’Espagne.
Par son économie, la Russie se distingue par quatre caractéristiques majeures :
- L’économie russe est une économie de transition ou du moins dont la transition s’achève, et qui reste encore marquée par son héritage soviétique ;
- Elle tend vers l’économie de rente, s’étant majoritairement repliée sur l’exploitation de ses ressources naturelles (pétrole, gaz naturel et divers métaux) à la suite de l’effondrement de la production industrielle depuis la chute de l’URSS. Ceci avec les conséquences politiques et sociales qu’engendrent en général la prédominance de ces secteurs (corruption, inégalités) ;
- C’est une économie qui souffre du vieillissement démographique, du fait de déséquilibres démographiques apparus dès la fin de l’époque soviétique ;
- C’est enfin une économie où l’État a joué et joue toujours un rôle majeur – qu’il s’agisse du contrôle des principales entreprises du pays ou de la place importante de la corruption (la Russie se place en 125e position sur 180 dans la liste de la perception de la corruption par pays en 2021).
Selon les statistiques officielles (contestées par d’autres sources), le taux de pauvreté s’élève à 14,3 % en 2019, un chiffre en augmentation par rapport à l’année précédente. Les études sociologiques indiquent que 12 % des citoyens russes n’ont pas les moyens de se payer une alimentation suffisante et que 25 % consacrent tous leurs revenus à ce poste de dépense, sans donc pouvoir s’acheter d’habits. Selon l’institut gouvernemental Rosstat, 35 % des foyers ne peuvent acheter à chaque membre de la famille une paire de chaussures par saison, 25 % ne peuvent pas recevoir d’invités faute de moyens, et 11 % ne peuvent acheter des médicaments vitaux. Selon l’institut indépendant Levada, les deux tiers des familles n’auraient aucune épargne, et 44 % d’entre elles auraient des dettes.
La réussite de la Russie ne serait qu’apparente.
Selon un article du Financial Times publié en 2013, le rythme de croissance de l’économie russe serait plus lent que la croissance économique moyenne mondiale entre 2014 et 2030. Le journal cite les analystes qui considèrent que la cause du ralentissement de la croissance est « l’incapacité de Moscou à améliorer le climat d’investissement et à donner davantage de liberté au secteur privé ».
La BBC, en se référant à ses experts, considère l’avenir de l’économie russe comme brumeux. Ainsi, selon le financier William O’Neil, l’économie russe serait « trop dépendante du pétrole et du gaz, frappée par la corruption, et il n’existe pas de base législative qui mérite confiance pour diriger une entreprise ». L’économiste Yakov Mirkine considère que le modèle d’économie russe est « épuisé », et dans le domaine du microfinancement une bulle s’est formée, qui va éclater nécessairement avec des scandales énormes.
Selon Valery Solovey, historien russe, analyste politique, publiciste et personnalité publique, les élites étatiques qui gouvernent le pays ne conduisent pas les réformes de marché nécessaires à la modernisation de l’économie nationale, afin de pouvoir continuer à « se nourrir » grâce à un modèle d’économie actuel propre qui leur est lucratif et de contenir la croissance d’une classe moyenne économiquement autonome. »
Selon Elvira Nabiullina, présidente de la Banque centrale de Russie, « le rythme de croissance économique est très lent, les entreprises ne voient pas encore de perspectives, les revenus de la population n’augmentent quasiment pas et les citoyens ressentent peu le fait que la stabilité réalisée leur ait donné une meilleure qualité de vie ».
Selon le pronostic du Fonds monétaire international publié en octobre 2019, la croissance du PIB russe en 2019 serait de 1,1 % et en 2020 de 1,9 % ; dans les années 2021 à 2024 le PIB croîtrait de 1,5 % par an. La part du PIB russe dans le PIB mondial devrait passer de 3,1 % en 2019 à 2,8 % d’ici 2024, au-dessous du minimum historique (3 %) de 1999.
Selon le pronostic du FMI publié en avril de la même année, le PIB nominal passerait de 1 600 milliards de dollars en 2017 à 1 900 milliards en 2024, le PIB à parité de pouvoir d’achat de 4 000 milliards à 5 200 milliards. L’inflation en 2019 serait de 5 % et diminuerait ensuite jusqu’à atteindre 4 % d’ici 2023.
L’économie russe subirait en fait une stagnation.
Bien entendu, le narratif fachosphérique fait de la Russie un véritable paradis économique comme le savent nos lecteurs. Et la réalité est que ces sanctions fonctionnent très bien et imposent la construction d’un narratif officiel russe efficace pour semer le doute dans l’esprit de l’opinion occidentale. Déjà en 2014, la Russie avait tenté la même propagande relativement efficace et pourtant…
Depuis l’adoption des sanctions économiques, les revenus des Russes ont diminué de 10 % et la pauvreté est en augmentation.
D’après une étude des économistes Matthieu Crozet, de l’Université Lingnan de Hong Kong, et Julian Hinz, de l’Institut pour l’économie mondiale de Kiel, les sanctions visant la Russie représenteraient un manque à gagner commercial de 4 milliards de dollars par mois pour les pays impliqués. 52 % de ces pertes seraient supportés par la Russie. Pour l’Union européenne, le manque à gagner s’élèverait à 1,5 milliard de dollars chaque mois.
2) Les sanctions
Résumé des principales sanctions et mesures de l’UE contre la Russie :
- Réduction de l’accès de la Russie aux marchés européens des capitaux
- Interdiction de vente d’avions et d’équipements aux compagnies aériennes russes
- Gel des avoirs de Vladimir Poutine et d’oligarques russes
- Exclusion du système bancaire Swift de plusieurs banques russes
- Gel des avoirs de la Banque centrale russe hors de Russie
- Fermeture de l’espace aérien européen à l’aviation russe
- Interdiction de diffusion dans l’UE des médias Russia Today et Sputnik
- Embargo sur le charbon russe
- Fermeture des ports de l’UE aux bateaux russes
- Fermeture des routes de l’Union aux transporteurs russes
- Livraison d’armes aux Ukrainiens
Liste des sanctions américaines.
a) Alors quels sont les effets de ces sanctions?
Et à commencer par les trois arguments sortis du chapeau de nos trolls russes:
- L’inflation
- La parité euro/rouble, le cours du rouble
- Les revenus croissants des énergies fossiles
Si l’inflation en France et en UE atteint des niveaux importants (5%) on est loin de « l’hyperinflation » évoquée par le posteur pro poutine publié ci dessus. Ou alors que dire de l’inflation russe qui atteint les …23% ??? La stagflation atteint d’abord la Russie qui connait une baisse de sa croissance de 10% . La Russie risque d’entrer dans sa pire récession depuis les années 1990. La même crise qui avait entraîné un tel mécontentement qu’il avait provoqué la chute des gouvernements de l’époque stoppée par l’arrivée d’un certain…Poutine. Le taux directeur de la banque centrale russe a atteint 14% (17 le mois dernier).
D’ailleurs ces problèmes sont étroitement liés. La banque centrale de Russie ayant abondamment soutenu le rouble pour éviter son effondrement. Mais la même BCR reconnait que les problèmes sont là, qu’ils sont gravissimes et qu’à long terme intenables:
Alors que la monnaie reprend pied, le Kremlin espère reporter son attention sur l’économie pour absorber le coup des sanctions occidentales.
La CBR a estimé que l’économie russe se contracterait de 8% à 10% cette année et a noté qu’elle se préparait à une aggravation potentielle des restrictions imposées par les puissances mondiales alors que la guerre en Ukraine fait rage.
« La baisse du potentiel de l’économie russe entraînée par les restrictions pourrait s’avérer plus prononcée que ne le suppose le scénario de base », a déclaré la CBR dans un communiqué.
Dernier problème, les énergies fossiles, cruciales pour l’économie occidentale financent encore le régime poutinien, mais cachent certaines choses:
Gaz, pétrole, charbon… Trop dépendante, l’Union européenne tente de se défaire de son addiction aux matières premières de son voisin. Début avril, les représentants des Vingt-Sept se sont accordés pour bannir les importations de charbon russe d’ici août. Dans les prochains jours, la Commission européenne pourrait voter un embargo similaire sur les produits pétroliers. Si ces sanctions ne sont pas encore effectives, les importations européennes de charbon ont tout de même diminué de 40 % début avril au regard de la période janvier-février. Le pétrole brut, lui, a connu une baisse de 20 %. «L’Europe a été tellement dominante en tant qu’acheteur de combustibles fossiles en provenance de Russie que même les réductions en cours n’ont pas changé grand-chose à la situation», tempère l’analyste.
Si pour la Russie, il s’agit d’un véritable manque à gagner, cela devient aussi un surplus de production. Courant mars et avril, de nombreux navires sont partis de ports russes, chargés en pétrole et en gaz, sans connaître leur destination. Sans l’Europe, la Russie peine à trouver preneur. L’Inde, la Corée du Sud, l’Egypte et d’autres destinations «inhabituelles» ont finalement ouvert leurs ports aux pétroliers et méthaniers russes. Des nouveaux partenaires qui ne permettent en aucun cas de compenser la totalité de la baisse des importations européennes. «Les possibilités de détourner les exportations de la Russie vers d’autres destinations sont limitées, notamment en raison de l’insuffisance des infrastructures et des longues distances de transport», explique Lauri Myllyvirta.
En fait, l’économie russe ne tient encore que grâce à l’aide que nous lui apportons encore en lui achetant ses énergies fossiles. Problème qui pourrait être contourné:
Environ 80% du charbon, 40% du gaz naturel et entre 20 et 40% du pétrole utilisés en Europe sont importés de Russie, explique le professeur Isabelle Mejean, chargée de recherche au Centre for Economic Policy and Research (CEPR). Le coût d’un renforcement des sanctions à l’encontre de la Russie dépend donc largement de la possibilité de s’approvisionner en pétrole et en gaz dans d’autres pays – ce qui est relativement facile pour le pétrole, mais beaucoup plus difficile pour le gaz naturel, qui nécessite l’existence de gazoducs. En cas d’embargo sur le pétrole et le gaz russes, le prix du gaz risque donc d’augmenter fortement.
Quelles seraient les conséquences de cette hausse des prix sur les pays européens ? Selon les économistes de Sciences Po, le choc ne serait pas aussi grave que redouté. La question est avant tout politique, explique le professeur Xavier Ragot, président de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) : « Qui va payer, et quand ? ». Si la guerre se poursuit pendant plus d’un an, le PIB français est projeté de baisser de 1 à 2%, et avec une augmentation du chômage de 1,5%. « Nous pouvons absorber ce choc », affirme Xavier Ragot, surtout si l’on considère la croissance attendue en 2022 du fait de l’atténuation de la pandémie de Covid. Dans les faits, « la croissance de notre PIB passerait de 4 à 3% », explique-t-il.
Le principal enjeu est la répartition de ce choc au sein de la population française : les ménages les plus pauvres sont beaucoup plus exposés aux prix de l’énergie. » La clé est d’être assez intelligent pour cibler les outils fiscaux sur les pauvres » tout en considérant les grandes diversités dans ce groupe, notamment entre urbains et ruraux, déclare Xavier Ragot. Pour éviter un « désastre humain », les ménages pauvres devraient être compensés » avec 2 à 3 fois plus que leur baisse moyenne de revenu », explique-t-il : et ces outils ciblés doivent être mis en place dès maintenant.La même urgence est soulignée par Moritz Schularick, professeur d’économie à Sciences Po et directeur du MacroFinance Lab. Le 8 mars, le Pr. Schularick a publié un » ECONtribute Policy Brief » sur l’impact économique d’une potentielle coupure des importations énergétiques russes sur l’Allemagne. Les résultats sont beaucoup moins alarmants que ceux annoncés par le gouvernement allemand : une baisse de « 2 à 3 % environ » du PIB allemand en 2022 . L’industrie allemande utilise principalement le gaz naturel pour des opérations de chauffage, qui pourraient éventuellement passer au pétrole ou à d’autres sources de chaleur, souligne-t-il. Les changements nécessaires pour s’éloigner du pétrole et du gaz russes doivent être effectués le plus tôt possible, profitant de la baisse de la consommation en été. Mais le gouvernement allemand n’a pas montré une forte volonté d’aller dans cette direction, et subit un fort lobbying de la part de l’industrie.
b) Mais encore?
- Les ventes de voitures neuves se sont effondrées en mars, chutant de plus de 60 % sur un an. Cela confirme que les sanctions ont d’ores et déjà indirectement touché le pouvoir d’achat des Russes. Dans le secteur des services, l’indice PMI est passé à 38, en dessous du seuil de 50 annonçant la contraction de l’activité du secteur. Selon les données d’Avtostat citées par Kommersant, les prix des voitures neuves ont augmenté en moyenne de 40% en mars, et jusqu’à 60% pour les voitures haut de gamme.
- Les très hautes technologies pourraient ne pas survivre, comme les recherches sur l’IA, le nucléaire, toute l’industrie dépendante des semi conducteurs (dont l’armée et l’aviation).
- Effondrement du marché de la pub:
- Un exode des investisseurs qui pourrait ne pas être totalement compensé « par les dépenses budgétaires », pointe l’instance financière. « Par conséquent, les perspectives restent sombres. » Résultat, outre la forte récession prévue pour 2022, le FMI s’attend à une baisse d’au moins 2,3% en 2023. Exode notamment du au défaut d’assurance. Même des entreprises comme « Koch Industries » finissent par se résoudre à quitter la Russie.
- Flambée des taux de crédit: 20% dans l’immobilier.
- Les déposants ont retiré 2,4 billions de roubles dans les premières semaines après le déclenchement de la guerre, engloutissant l’équivalent d’un an de bénéfices bancaires et un tiers de capital accumulé.
c) Alors est ce que ça fonctionne?
La réponse est « oui mais on n’en voit pas encore les effets véritables ».
Et c’est un officiel russe qui le dit et pas n’importe lequel, le directeur de la BCR, Elvira Nabiullina:
Présentant le rapport annuel de la CBR au parlement cette semaine, Nabiullina a brossé un tableau aux législateurs de la gravité de la situation à laquelle elle était confrontée.
Les déposants ont retiré 2,4 billions de roubles dans les premières semaines après le déclenchement de la guerre, engloutissant l’équivalent d’un an de bénéfices bancaires et un tiers de son coussin de capital accumulé.
Sans l’imposition de contrôles stricts des capitaux, il y aurait eu « une série de défauts et un effet domino » dans tout le système financier, a-t-elle soutenu.
Cela ne s’arrête pas là non plus, pas de loin, car les entreprises ont des flashbacks sur ce que c’était lorsque la pandémie de coronavirus a frappé.
« Les congés de remboursement des prêts ont repris. Actuellement, leur demande est comparable au premier mois [of] le verrouillage de 2020. »
De nombreux moratoires ont également été accordés pour assouplir les exigences réglementaires des banques, les comptables étant effectivement autorisés à geler la valeur des actifs de leurs bilans à des niveaux artificiellement élevés d’avant la crise.
Les déprécier pour refléter la réalité de la contraction de l’économie russe ne ferait que déclencher une vague paralysante de désendettement parmi les prêteurs, soit par des désinvestissements, soit par un retrait du crédit à l’économie, soit par un mélange des deux.
« L’ampleur actuelle de l’assouplissement réglementaire est sans précédent », a-t-elle admis, affirmant que, autrement, les mesures d’assouplissement n’auraient pas été à la mesure de l’ampleur des problèmes rencontrés.
Depuis que les réassureurs étrangers annulent leurs contrats avec des sociétés russes, la banque centrale de Nabioullina a été contrainte de multiplier par 10 le capital garanti de la société russe de réassurance nationale pour s’assurer qu’il y avait suffisamment de réserves pour couvrir les pertes assurées.
La douleur commence seulement maintenant
Bien que toutes ces mesures et bien d’autres mises en place par la CBR aient pu empêcher un effondrement du système bancaire, les entreprises privées de matières premières essentielles et étouffées par leurs marchés d’exportation connaîtront de graves difficultés alors qu’elles s’efforcent de s’adapter .
« Les sanctions ont affecté le marché financier, mais maintenant elles vont commencer à avoir un impact de plus en plus important sur l’économie réelle », a déclaré le gouverneur.
Bien que l’inflation ait dépassé 9 % en février, son comité de politique monétaire ne visera qu’un retour à 4 % pour 2024. Ils n’interviendront pas non plus si les prix à la consommation augmentent entre-temps.
Nabiullina a déclaré qu’il s’agissait d’un processus naturel et inévitable alors que les chaînes d’approvisionnement s’adaptent aux sanctions. En d’autres termes, la banque centrale est impuissante à cet égard, car une hausse de son taux de référence de 17 % ne résoudrait pas les restrictions à venir du côté de l’offre .
« Actuellement, ce problème n’est peut-être pas aussi aigu parce que l’économie a encore des stocks, mais nous pouvons voir que les sanctions sont renforcées presque tous les jours », a ajouté Nabiullina, prédisant qu’il n’y avait aucun moyen de dire combien de temps cela durera potentiellement.
« Déjà au deuxième trimestre, début du troisième trimestre, nous entrerons activement dans une période de transformation structurelle et de recherche de nouveaux modèles commerciaux pour de nombreuses entreprises. »
Traduction : les entreprises russes n’ont même pas commencé à ressentir la douleur.
CONCLUSION (temporaire)
Contrairement donc au narratif venue tout droit de Russie et à ses relais de la fachosphère en Europe (en France en ce qui nous concerne), les sanctions économiques fonctionnent bien. La réactivité de la BCR (bien meilleure que l’armée russe) a sauvé temporairement la situation, mais même son directeur prévoit le pire à moyen et long terme.
Selon Andreï Iakovlev, de la Haute école d’économie de Moscou, la véritable crise n’atteindra l’économie réelle que cet été ou cet automne: «en mai, un grand nombre d’entreprises sont susceptibles de s’arrêter» faute de composants importés, notamment dans l’industrie automobile qui emploie des centaines de milliers de personnes.
Anders Aslund, économiste spécialiste de l’économie russe est très clair:
Pour de nombreuses raisons, la plupart des gens sous-estiment l’impact des sanctions occidentales sur la Russie. Ils sont susceptibles de devenir beaucoup plus graves au cours des prochains mois.
1. Les sanctions financières ont eu un impact immédiat, mais elles frapperont plus durement, car les réserves libres de CBR s’épuisent et davantage de banques sont touchées. Au cours des 5 premières semaines, la CBR a dépensé 40 milliards de dollars de réserves, mais elle n’avait que 62 milliards de dollars de réserves liquides non sanctionnées. Ainsi, le taux de change du rouble est difficilement tenable mais risque de chuter à moins d’une régulation complète. Le plus gros coup pourrait être les contrôles occidentaux des exportations. La Russie ne peut pas importer presque tout ce dont elle a besoin comme intrants dans sa fabrication. Il ne peut pas produire de voitures, de chars, de missiles, de produits d’hygiène ou même de papier d’impression. Les intrants importés sont nécessaires partout.
4. La plupart des transports – aériens, routiers, ferroviaires et maritimes – ne sont pas sanctionnés, ce qui aggrave les sanctions commerciales.
5. La Russie est devenue non assurable et pratiquement rien ne peut être fait commercialement dans ou avec le pays.
L’UE a déjà décidé d’arrêter les importations de charbon. Les importations de pétrole seront bientôt réduites (54% de la valeur des importations) ainsi que le gaz (14% de la valeur des importations). 7. 700 grandes multinationales ont décidé d’arrêter de faire des affaires avec la Russie car c’est mauvais pour votre réputation. Par conséquent, je ne pense pas que le PIB de la Russie cette année ne chutera que de 10 à 15 % (consensus), mais bien davantage. Une personne est responsable de cette folie : Poutine. Pourquoi le peuple russe accepterait-il d’être longtemps gouverné par un tel fou ?
Pour Poutine, la plus grande question à l’avenir sera de savoir s’il peut adapter son économie à un isolement à long terme. D’autres économies qui ont été confrontées à une mainmise similaire, comme celle de l’Iran, l’ont fait, et Moscou peut faire fonctionner ses banques pendant longtemps grâce aux subventions générées par l’énergie si elles deviennent techniquement insolvables ; La Russie, contrairement à l’Iran, n’a pas été confrontée à un étranglement quasi total de ses exportations d’énergie. Mais le refus des importations occidentales de biens de consommation et de matériaux et pièces de production, ainsi que les tensions croissantes sur les finances russes finiront par nuire gravement à l’économie. Et si le chômage monte en flèche, cela pourrait présenter à Poutine un problème auquel il n’a pas encore été confronté : la survie au pouvoir.
« Jusqu’à présent, le gouvernement continue de soutenir et de payer certains de ces travailleurs », a déclaré Fishman, l’ancien expert du département d’État. « Mais combien de temps peuvent-ils garder ça? Je pense que vous allez voir des vagues de chômage dans le reste de 2022 presque indépendamment de ce qui se passera ensuite sur les sanctions. »
En fait le problème est réellement extrêmement important, car la partie cachée intéressante est que les sanctions font plus mal que ce qu’en dit la Russie et qu’elles deviennent un levier pour mettre fin à la guerre à un moment donné…
En conclusion, la fachosphère est bien embêtée parce que les sanctions contre la Russie marchent.