Un cimetière ? Quel cimetière ? Sad Hill…
Tout le monde connaît la célèbre réplique issue de Le bon, la brute et le truand (1968). Mais ce qui nous intéresse aujourd’hui, ce n’est pas un cimetière fictif de cinéma, c’est plutôt une affaire bien de chez nous.
Essayons d’être concis : un graff sur le mur tout neuf du cimetière militaire de Larressore, l’extrême droite va essayer de s’emparer de l’affaire et ça va faire pshiit.
Ce n’est pas la première fois que l’extrême droite essaie d’instrumentaliser les cimetières, on va vous expliquer comment et pourquoi.
L’affaire du cimetière de Larressore
Mais avant tout, il faut jeter un coup d’œil à la chronologie des faits.
Début décembre 2024, une cérémonie officielle était organisée avec élus, préfet, associations et quelques officiers à l’occasion de la réfection du cimetière de Larressore, au Pays Basque. Y sont enterrés 131 soldats de la grande guerre, de toute nationalité. Le symbole est fort.
En ce mois de janvier 2025, un graff apparaît sur le mur du cimetière. Faut-il le préciser, il s’agit du mur extérieur. Les auteurs ne sont pas anonymes, il s’agit d’un groupe antifasciste, le kontseilu sozialista. La peinture est réalisée le même jour qu’une manifestation antifascsite à Bilbao.
La même semaine, outrée par le geste, la maire de la commune, Laurence Samanos annonce déposer plainte. Jusque là, rien de très surprenant, la presse régionale relaie l’affaire sans conviction avec des papiers factuels.
Le mur est situé en plein Larressore, à quelques dizaines de mètres de la route. La réalité, c’est que les travaux de réfection ont redonné de la visibilité à un mur qui ne l’était plus. La suite, c’est que ce mur est le long d’une route passante qui relie Saint-Jean-Pied-de-Port et Bayonne. Un spot qui serait prisé par n’importe quel graffeur.
Conclusion, ce qui a intéressé nos camarades peintres, c’est le mur et sa visibilité, et pas le cimetière dans lequel il n’y a pas eu une goutte de peinture.
Tentative d’instrumentalisation
A partir de la plainte, et de la médiatisation à l’échelle locale, il va y avoir une tentative d’instrumentalisation. Commençons par un point de contexte. Larressore c’est 65% de vote contre le RN à la présidentielle de 2022 (58% sur tout le territoire). La 6ème circo des Pyrénées Atlantique est PS, le RN arrive troisième aux législatives de 2024 avec 25% de vote. En 2007, le FN y faisait 2%. Malgré tout, nous sommes loin d’être dans un coin acquis à l’extrême droite.
Bayonne, la ville la plus proche, est UDI. Un bon vieux bastion de droite, pas d’extrême droite.
Reprenons donc nos réseaux sociaux.
Sous un post de Sud-Ouest sur Facebook, nous allons retrouver les habituels trolls, distillant leur discours agressif et décliniste. Rien de nouveau sous le soleil. Les commentateurs inscrivent l’évènement dans une tendance qu’ils auraient constaté.
Quelques figures de la droite locale à la rescousse
Le soufflé retombe
Que conclure de cette histoire ?
- Première leçon, l’extrême droite n’est pas assez implantée localement pour lancer une campagne autour de l’évènement.
- Deuxième leçon, les militants isolés de tendances différentes ne trouvent pas les relais habituels. Le sénateur LR n’est pas repris par les canaux d’extrême droite habituels de réinformation et leur force de frappe.
Entre les fanatiques de Fatcap Decap’four (les embouts volés sur les bombes de détergent qui permettent de faire des traits très larges à la bombe) et les juristes en herbe qui invoqueront l’article 322 du code pénal, il y a un juste milieu. Le graffiti, c’est interdit, tout le monde le sait. Si les deux bords sont inconciliables, mettons nous d’accord sur le fait qu’il ne s’agit pas ici d’une profanation.
Passion cimetière
Parce que la profanation, ce n’est pas vraiment la même chose, et c’est ailleurs dans le code pénal. C’est l’article 225 qui dit (coucou les juristes !) :
Toute atteinte à l’intégrité du cadavre, par quelque moyen que ce soit, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
La violation ou la profanation, par quelque moyen que ce soit, de tombeaux, de sépultures, d’urnes cinéraires ou de monuments édifiés à la mémoire des morts est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
La peine est portée à deux ans d’emprisonnement et à 30 000 euros d’amende lorsque les infractions définies à l’alinéa précédent ont été accompagnées d’atteinte à l’intégrité du cadavre.
Et justement, dans le registre de la profanation de cimetière, l’extrême droite n’est pas en reste. C’est un euphémisme. On retrouve des militants d’extrême droite au centre de nombreuses affaires de profanations ces dernières décennies.
L’exemple le plus criant est l’affaire de Carpentras qui a profondément choqué les français, en 1990. Au point de voir Mitterand lui-même se déplacer pour participer à la marche blanche.
Depuis, les affaires se sont succédé, ciblant des cimetières Juifs puis musulmans.
Alors, certains se sentent un peu péteux et tentent de lancer des contre-feux. Aux dégradations de lieux de cultes Juifs et musulmans, la réponse a été un « observatoire de la christianophobie« . Seulement, la réalité, c’est que les dégradations hors extrême droite est difficile à politiser.
Ces résultats venant de l’agrégateur Fdesouche le montrent bien, ils n’ont pas grand chose à se mettre sous la dent. Prenons une affaire parmi celles-ci. La plus spectaculaire, qui nous vient de Dordogne.
Ça y est, ils ont trouvé leur affaire de profanation d’extrême gauche !!!! Les coupables ont tagué leurs menaces contre Bardella, Marine Le Pen et… Mélenchon !? L’article est un copier-coller venant de France Bleu et dépeint surtout un grand manque de cohérence du ou des auteurs(s).
Vincent Lapierre s’y précipite. Il a surtout relevé une référence « vengeance pour Cherbourg », faisant référence à l’affaire Mégane. Un viol avec torture dont la fachosphère avait tenté de s’emparer après le succès de la récupération autour de Lola.
Même avec ces relais, l’affaire ne prend pas et ne parvient pas à atteindre le paysage audiovisuel mainstream. Quand ça veut pas…
Conclusion
Au final, l’affaire du cimetière de Larressore est un non-évènement. Même la gendarmerie a renvoyé les velléités d’instrumentalisation de leurs pénates. L’enseignement essentielle, c’est bien celui ci : les mensonges et autres indécences de la fachosphère n’ont pas de prise s’ils n’ont pas de relais. Le flamme s’étouffe d’elle-même.
Enfin, cette stratégie de contre-feux ne prend pas non plus pour une autre raison. Ils ont beau chercher, il n’y a pas de profanation, rien de spectaculaire à mettre en scène.
Un grand merci à nos camarades basques de Informazio antifaxista pour leur aide.
Faxismoaren aurka borrokatu !